vendredi 3 juillet 2015

Épouser une tradition sans en épouser les querelles...,2: une réponse à Héléna

Héléna, tu me coupes l'herbe sous le pied : j'aurais pu écrire ton article, ou le signer des deux mains tant je m'y retrouve bien !
Aussi, plutôt que de répéter ce que tu dis, voudrais-je aller un peu plus loin sur deux points.
  • Je pense comme toi que le premier pas dans l’œcuménisme est de réussir à voir chez la personne d'une autre confession quelqu'un qui cherche le Christ avec autant de bonne volonté et d'entrain que soi. C'est facile sur le papier, mais un vrai chemin de crête dans une situation concrète. En effet, il faut tenir ensemble une suspension du jugement et une objectivation du regard qui permettent de voir la réalité de la vie et du cheminement spirituel du frère séparé, et en même temps il ne faut pas tomber dans une sorte de naïveté ou de relativisme qui donneraient à penser soit que tout est beau, tout est merveilleux, tout est pareil chez tout le monde, soit que les différences ne sont qu'apparentes et que l'on peut finalement bien en faire fi.
  • Un autre enjeu de l’œcuménisme, il me semble, est la nécessité de connaître vraiment les confessions séparées. Souvent (chez les catholiques en tout cas), mis à part dans les milieux explicitement militants de la cause, c'est une méconnaissance et une bienveillante indifférence qui prédominent.
    On peut se dire – et au regard de l'histoire, c'est déjà pas mal - que c'est un premier pas, un progrès par rapport au mépris ou à la haine. Mais pour autant, cela ne va pas loin et cela n'engage pas; c'est une attitude un peu tiède (et l'on sait ce que le Seigneur en fait...). Or, pour aimer réellement son frère, il faut le connaître et il faut se mouiller. Ce n'est évidement pas approuver tout ce qu'il fait et pense, mais c'est avoir fait l'effort intellectuel et spirituel d'entrer dans l'intelligence de sa foi en prenant le temps de l'interroger en profondeur sur ce qu'il vit, et en se confrontant franchement aux grands auteurs de sa pensée et de sa spiritualité. C'est prendre le risque de sortir de ses schémas, de son confort, du ronronnement de l'entre-soi. Le premier mouvement de cette dynamique est tout sauf confortable, parce qu'il dérange et remet en cause des points que l'on croyait acquis. Mais il permet, d'une part, de grandir dans sa foi personnelle en « la passant par l'eau et le feu » (ps 33), et d'autre part de faire un pas vers le frère et par là un acte de charité.

Cédric de La Serre

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