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vendredi 31 juillet 2015

Lead, Kindly Light

Mes lectures récentes me donnent envie de partager ce poème 'œcuménique' (il a été mis en musique et est chanté en Grande-Bretagne tant par des catholiques que par des anglicans) de John-Henry Newman, théologien anglais du XIX° siècle. Il me semble qu'il peut donner un beau ton au dialogue œcuménique qui se situe dans la tension entre la volonté ferme de suivre fidèlement le Christ et le constat désolant que l'on fait de nos faiblesses, de nos médiocrités, de notre péché, bref, de tout ce qui empêche de suivre pleinement le commandement du Christ, "qu'ils soient un comme nous sommes un". 

Conduis-moi, douce lumière, parmi l'obscurité qui m'environne, conduis-moi !
La nuit est sombre, et je suis loin du foyer, conduis-moi !
Garde mes pas ; je ne demande pas à voir
Les scènes éloignées : un seul pas est assez pour moi

Je n'ai pas toujours été ainsi : je n'ai pas toujours prié que tu me conduises ;
J'aimais choisir et voir mon chemin, mais maintenant conduis-moi.
J'aimais le jour éclatant, et, malgré mes craintes,
L'orgueil dominait mon vouloir : ne te souviens pas des années passées.

Aussi longtemps que Ta puissance m'a béni, aussi longtemps elle me conduira encore,
À travers landes et marécages, rochers et torrents, jusqu'à ce que la nuit s'achève
Et qu'avec ce matin sourient ces visages angéliques
Que j'ai longtemps aimés et perdus pour une heure.


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En version originale:

Lead, kindly Light, amid th’encircling gloom, lead Thou me on!
The night is dark, and I am far from home; lead Thou me on!
Keep Thou my feet; I do not ask to see
The distant scene; one step enough for me.

I was not ever thus, nor prayed that Thou shouldst lead me on;
I loved to choose and see my path; but now lead Thou me on!
I loved the garish day, and, spite of fears,
Pride ruled my will. Remember not past years!

So long Thy power hath blest me, sure it still will lead me on.
O’er moor and fen, o’er crag and torrent, till the night is gone,
And with the morn those angel faces smile, which I
Have loved long since, and lost awhile!

Cédric de La Serre

dimanche 12 juillet 2015

Quelle unité?

Le séjour que nous effectuons à Jérusalem n'est possible que grâce à l'association pour l'unité des chrétiens, parce c'est un séjour marqué par une forte dimension œcuménique et que l'association cherche justement à promouvoir des liens, des rapprochements, bref l'unité, entre les confessions chrétiennes. C'est cela qui m'a séduit dans le projet, et m'a poussé à me porter candidat : parce que je prend au sérieux tout l'enseignement du Christ. Je ne peux ainsi pas ignorer ce qui constitue une partie de son 'testament', dans l'évangile selon St Jean, son dernier grand discours, dans lequel il conclue par une prière : « Père saint, garde-les en ton nom que tu m'as donné, pour qu'ils soient un comme nous sommes un » (Jn 17, 11). Cette volonté du Christ, volonté que je vois déchirée par l'existence d'une multitude de confessions et dénominations chrétiennes, me pousse à chercher moi aussi à participer au rétablissement de cette unité.

J'ai eu du mal à trouver une image pour illustrer mon propos. En fouillant sur Google, c'est finalement celle-ci que j'ai retenue. D'une part parce qu'elle vient d'un site Protestant (en l’occurrence celui de l'Eglise protestante unie) et qu'en affirmant m'y retrouver je pose un acte d'œcuménisme, mais aussi parce que ce dessin montre bien que l'Esprit-Saint est libre et souffle où il veut; aucune confession ne peut prétendre le retenir ou le posséder seule. La seule limite que je vois à ce dessin est qu'il ne montre pas que la barque est celle de Pierre ;-)
Les dix premiers jours du séjour, les rencontres et quelques lectures m'ont interpellés sur la forme d'unité que l'on recherche : qu'est-ce qu'être « un comme nous sommes un » ? J'ai l'impression, certes un peu floue, que la définition de l'unité n'est pas la même dans chaque dénomination. Autrement dit, que le but poursuivi par le dialogue œcuménique ne vise pas à la même fin selon que l'on est catholique ou protestant. Ce serait pour le moins gênant : parle-t'on toujours de la même chose quand on dialogue ? N'y a t'il pas un malentendu de fond ? Vise-t'on la même fin ?


En particulier, il me semble que l'une des difficultés est plus d'ordre psychologique (ou bien sémantique) que théologique : Naturellement, intuitivement, on cherche à établir ad-extra une forme d'unité similaire à ce que l'on vit ad-intra. C'est-à-dire que selon le mode d'exercice de l'unité que l'on vit dans sa confession, on imagine a-priori que l'unité de toutes les confessions se construira par une forme d'extrapolation. Or, en fait, rien ne dit cela : Si le Christ nous appelle à l'unité – une unité vraie, réelle, profonde, 'parfaite' -, il ne nous dit pas quelle forme celle-ci doit prendre et rien n'oblige à ce qu'elle soit univoque et monochrome. Mais alors, quelle est-elle cette unité ?

Cédric de La Serre

samedi 4 juillet 2015

Se déplacer pour rencontrer



Il y a au quotidien des petites choses qui nous font sourire, lever les yeux au ciel ou qui nous agace... C'est la même chose ici comme en France. Ce soir j'ai eu envie de vous parler de ces personnes que l'on a croisé et qui sans aucun échange ont embelli ma journée, l'instant ou l'endroit où l'on se trouvait. 


Une des chose qui me frappe le plus ici, c'est cette diversité et cette cohabitation qui semble presque "idéale", j'entends par là qu'il est difficile de prime abord de distinguer un juif (à mois qu'il soit orthodoxe), d'un musulman, d'un chrétien. Je suis marquée par les attentions que les gens ont pu avoir à notre égard comme cette femme regardant passer notre bus dans Jérusalem et nous a fait un signe de la main ou encore ce musulman qui m'a tendu une crêpe palestinienne en me souhaitant la bienvenue. Aussi, cette petite fille au moment de la bénédiction avant le repas a assemblé ses mains en prière et s'est concentré de tout son petit corps pour ce moment qui lui semblait si important. 


C'est une réflexion que je me fais souvent. Bien souvent nous sommes tourné sur nous même et nous ne prenons pas le temps de découvrir les gens qui sont autour de nous. Nous ne pensons pas à nous attarder sur les personnes que nous croisons, nous les regardons à peine et nous les oublions aussi vite... Alors qu'au fond, il ne faut pas forcément rentrer dans une longue conversation avec eux pour les rencontrer. 

Finalement c'est ce qui me marque le plus ici, me déplacer pour rencontrer de nouvelles personnes, de nouveaux visages et être déplacée encore un peu plus pour commencer à voir le monde différemment. N'est ce pas ce que Jésus a fait lui-même lorsqu'il traversait tout le pays pour proclamer que le Royaume s'était approché? Il a lui même opéré ce déplacement et rencontré des gens, il s'est attardé sur ceux que l'on ne regarde plus et les a aimé. 

J'ai été très peu marquée par les lieux que l'on a visité, je trouve ça important et beau de pouvoir venir là où Jésus est né, là où les anges sont apparus etc mais au fond ce qu'il me semble encore plus important ici, c'est de comprendre à quel point Jésus ne se réduit pas à un lieu dans un temps donné. Mais plutôt de comprendre comment ce qu'il a fait ici il y a longtemps peut me rejoindre aujourd'hui et comment en essayant d'agir comme lui, je rends témoignage à mon tour du royaume qui s'est approché.

Karine.

vendredi 3 juillet 2015

Épouser une tradition sans en épouser les querelles...,2: une réponse à Héléna

Héléna, tu me coupes l'herbe sous le pied : j'aurais pu écrire ton article, ou le signer des deux mains tant je m'y retrouve bien !
Aussi, plutôt que de répéter ce que tu dis, voudrais-je aller un peu plus loin sur deux points.
  • Je pense comme toi que le premier pas dans l’œcuménisme est de réussir à voir chez la personne d'une autre confession quelqu'un qui cherche le Christ avec autant de bonne volonté et d'entrain que soi. C'est facile sur le papier, mais un vrai chemin de crête dans une situation concrète. En effet, il faut tenir ensemble une suspension du jugement et une objectivation du regard qui permettent de voir la réalité de la vie et du cheminement spirituel du frère séparé, et en même temps il ne faut pas tomber dans une sorte de naïveté ou de relativisme qui donneraient à penser soit que tout est beau, tout est merveilleux, tout est pareil chez tout le monde, soit que les différences ne sont qu'apparentes et que l'on peut finalement bien en faire fi.
  • Un autre enjeu de l’œcuménisme, il me semble, est la nécessité de connaître vraiment les confessions séparées. Souvent (chez les catholiques en tout cas), mis à part dans les milieux explicitement militants de la cause, c'est une méconnaissance et une bienveillante indifférence qui prédominent.
    On peut se dire – et au regard de l'histoire, c'est déjà pas mal - que c'est un premier pas, un progrès par rapport au mépris ou à la haine. Mais pour autant, cela ne va pas loin et cela n'engage pas; c'est une attitude un peu tiède (et l'on sait ce que le Seigneur en fait...). Or, pour aimer réellement son frère, il faut le connaître et il faut se mouiller. Ce n'est évidement pas approuver tout ce qu'il fait et pense, mais c'est avoir fait l'effort intellectuel et spirituel d'entrer dans l'intelligence de sa foi en prenant le temps de l'interroger en profondeur sur ce qu'il vit, et en se confrontant franchement aux grands auteurs de sa pensée et de sa spiritualité. C'est prendre le risque de sortir de ses schémas, de son confort, du ronronnement de l'entre-soi. Le premier mouvement de cette dynamique est tout sauf confortable, parce qu'il dérange et remet en cause des points que l'on croyait acquis. Mais il permet, d'une part, de grandir dans sa foi personnelle en « la passant par l'eau et le feu » (ps 33), et d'autre part de faire un pas vers le frère et par là un acte de charité.

Cédric de La Serre

Premier tour de table

Hier soir, au terme de notre première journée d'étude et de découverte de Jérusalem, notre groupe a entrepris un tour de table pour permettre à chacun de ses membres se présenter et de dire quelque chose de son parcours de foi ou des raisons qui l'ont conduit jusqu'en Terre Sainte cet été. Ce tour de table m'a touché et interpellé sur trois points que je voudrais partager:

- D'abord, la majorité des membres du groupe est américaine, et, mis à part le fameux quartet français envoyé par l'association pour l'unité des chrétiens, tous sont anglophones. Mais les états de vie sont très divers : laïcs, prêtres/prêtresse, religieuse, célibataires, mariés, jeunes et vieux... De même, les confessions sont diverses : Je note une petite moitié de catholiques et un grand mélange de protestants, dont je n'ai pas toujours encore bien saisi les spécificités. Dans ce petit monde, il m'est émouvant de voir la liberté que se donne le Seigneur dans les façons qu'il a d'interpeller les personnes, de les toucher, de les conduire : Notre groupe d'une douzaine de membres est vraiment riche d'une grande diversité, et, au vu de ce que l'on a échangé hier, il ne m'est pas possible de dire que l'esprit souffle plus ou moins fort ici ou là.

- Le second point qui m'a interpellé est que notre manière d'exprimer notre relation au Christ est vraiment différente. Tous, nous sommes des chrétiens convaincus et des cadres ou futurs cadres d'églises. Et pourtant, notre façon de parler de notre relation au Christ est chaque fois nouvelle et unique : en donnant les grandes lignes de leur parcours de foi, certains commencent par mentionner leur rencontre avec Jésus, dont ils parlent comme d'une relation amoureuse. D'autres, au contraire, ne prononcent même pas le nom de Jésus-Christ, sans que l'on puisse pour autant les soupçonner de ne pas avoir de relation avec Lui. Probablement l'intimité de la question ne met elle pas tout le monde à l'aise, et il est normal de rester pudique en ne forçant pas la main. Mais en parlant de cela avec l'un ou l'autre, j'ai aussi pris conscience que toutes les confessions n'accordent pas la même centralité à l'annonce de Jésus-Christ et de son importance dans la vie de chacun. Pour reprendre une catégorisation que l'on aime bien chez les catholiques, il y a ceux qui sont franchement plus levure dans la pâte et ceux qui sont carrément lumière sur le boisseau.
- Enfin, une question, disons-même un petit malaise m'est apparu durant ce tour de table : certains racontaient, avec beaucoup de facilité, le changement de confession qu'ils avaient vécu durant leur vie. Pas tellement en raison d'une sorte de conversion qui leur aurait donné de comprendre que la confession d'à côté aurait été plus fidèle ou plus proche du Christ, mais pour des raisons de convenance personnelle, d’intérêt propre. S'il semble que l'approche protestante de la ''structure-Église'' soit très libre et souple (la multiplication des Églises en étant un signe), pour un catholique, c'est vraiment source de malaise : d'une part parce qu'il voit dans l’Église et sa structure – même éventuellement parfois pesante – quelque chose de l'héritage du Christ auquel il faut être fidèle si l'on veut Lui être fidèle, mais aussi parce que cela pose question sur la foi : à quoi croit-on vraiment quand on peut papillonner d'un groupe à l'autre uniquement parce que notre supérieur ne nous plaît pas ? Si je pourrais comprendre ce comportement de la part d'un paroissien à la foi peu enracinée et cherchant avant tout dans la pratique religieuse que « cela fasse du bien » et qu'il éprouve des sentiments positifs, de la part d'un cadre d'église, cela me laisse très dubitatif : ces sentiments superficiels et subjectifs devraient selon moi laisser la place - ou au moins être ordonnés - à la volonté de se donner au Christ, de le suivre et de chercher à faire sa volonté.

Voilà trois réflexions qui sont nées hier soir de la prise de connaissance des uns et des autres. Manifestement, ce séjour s'annonce très riche pour peu que l'on accepte de se laisser déplacer, ce qui n'est jamais confortable mais permet généralement d'en sortir grandi.

Cédric de La Serre

Epouser une tradition sans en épouser les querelles...



Ainsi donc, recherchons ce qui contribue à la paix et à l'édification mutuelle. Ro 14,19

Un des fondements de l’œcuménisme est, à mon sens, de reconnaître à celui, à celle qui se tient devant moi son identité de disciple de Christ à part entière. Celui, celle qui n’appartient pas à ma confession a autant de choses à me dire sur ma relation à Christ qu’une personne de ma même confession.

Peut-être serait-il bon dans ce sens d’élargir le concept d’édification mutuelle à l’ensemble des dénominations chrétiennes. Dans cette perspective, pour une protestante comme moi, cela signifierait se mettre à l’écoute de Dieu dans d’autres expressions de foi, s’émerveiller par exemple - et ce n’est qu’un exemple parmi une multitude d’autres - de la beauté liturgique orthodoxe, de la passion de l’unité catholique ou du zèle évangélique.

Se laisser rejoindre là où d’autres traditions ont mis l’accent, apporter chacun sa petite pierre a l’édifice de la glorification de Dieu et s’arrêter un instant pour entendre les pierres chanter d’une seule voix.

Il ne s’agit pas à mon avis dans l’œcuménisme de gommer les différences en cherchant un accord par le bas, en réduisant la richesse inextinguible de chaque confession. Il s’agirait plutôt de rester à l’écoute de tout ce que nos frères et nos sœurs ont à nous dire sur cette parcelle du Christ qui s’est éveillée en eux après L’avoir rencontré.  

Nous avançons tous à tâtons, qui pourrait dire – malgré une tradition deux fois millénaire - qu’il comprend tout de Celui qui reste pour chacun et chacune d’entre nous l’Insaisissable? Mais si, au milieu de ce chemin obscur où nous faisons route vers la lumière du Christ, nous pouvons trouver des mains ouvertes et amies, pourquoi nous en priver ?

Helena Vicario