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vendredi 31 juillet 2015

Quelques actualités de Terre Sainte

L'actualité de la Terre Sainte raisonne ces jours-ci avec quelques uns des articles qui ont été posté sur ce blog au cours du mois dernier.

Aussi, peut-on suivre ce qui se passe:

- A propos de l'incendie du monastère de Tabgha, des suspects ont été inculpés:

- A propos des familles de Beit Jala qui risquent de se voir privées de leurs terres - leur moyen de subsistance - du fait du passage du mur en construction. Après plusieurs péripéties judiciaires et diplomatiques, la cour suprême a finalement autorisé la construction du mur, ce qui provoque à nouveau la mobilisation des futures victimes potentielles. Ces chrétiens demandent aux autres chrétiens du monde de se mobiliser et de faire savoir ce qu'ils subissent, ce que je fais donc!


- A propos des relations très tendues entre Arabes et Juifs israéliens dont nous avons été témoins, en particulier dans le centre-ville sur-réaliste et apocalyptique d'Hébron, un fait-divers tragique vient corroborer nos sentiments.

Cédric de La Serre

lundi 27 juillet 2015

"Qu'as-tu fait ? Ecoute, le sang de ton frère crie du sol vers moi !" (Gn 4,10)


            Journée… difficile et pesante… emprunte d'amertume et pourtant d'espérance. Ce qui se joue sur cette terre est une véritable tragédie humaine pour deux peuples, deux peuples qui se sont entretués depuis de trop nombreuses années. Saint Paul ne dit-il pas "l'accomplissement parfait de la Loi, c'est l'Amour" (Rm 13,10, lecture du milieu du jour d'aujourd'hui) ?

Nous sommes allés à Hébron, lieu des tombeaux des patriarches, ville en territoire palestinien, colonisé petit à petit par des colons israéliens, avec des rues fantômes. Colère, amertume, incompréhension face à un peuple qui a tant souffert et qui fait souffrir à nouveau ses frères. Un rabbin nous disait qu'ils s'appuyaient sur la promesse faite à Abraham en Gn 12,2 : "Je ferai de toi une grande nation et je te bénirai". Le fait qu'au-dessus des tombeaux des patriarches se situent une mosquée et une synagogue certes séparées par un mur mais dans un seul bâtiment, n'est-il pas le signe que cette grande nation est plus large que beaucoup ne le pensent ?
Mausolée au-dessus du tombeau présumé d'Abraham visible de la mosquée et de la synagogue
La tente des nations (http://www.tentofnations.org/) nous a ensuite ouvert les bras : seul cas dans tous les territoires palestiniens où une famille possède les documents indiquant qu'ils sont propriétaires de leur terre depuis au moins 1916. Régulièrement, leurs plantations (ils vendent des fruits) ou leurs citernes (ils n'ont accès ni à l'eau courante, ni à l'électricité) ou toute nouvelle construction sont détruites, la route d'accès a été barrée par des gravats pour des raisons de sécurité. Les documents leur indiquant que leurs plantations d'arbres fruitiers ou leurs constructions vont être détruites ne leur sont pas remis en mains propres mais laissés sur une pierre près du lieu de destruction. On leur interdit systématiquement de planter ou de construire quoique ce soit et la loi prévoit que si, pendant trois ans, leur terrain n'est pas utilisé, il devient propriété du gouvernement. Ce qui m'a frappé est que, malgré les tensions et les cinq colonies environnantes, la paix règne dans ce lieu. Cette famille chrétienne continue à accueillir des jeunes pour leur donner le sens de la terre, de l'écologie, de l'amour et de l'espoir. Leur motivation est : "nous refusons d'être ennemis". Leur vision, qui n'est pas qu'un simple slogan mais qu'ils vivent profondément, repose sur les vertus théologales, dons de Dieu : une foi pratiquée ; un refus de la haine par l'amour des autres (tous) et de la terre ; un refus de devenir des victimes par une espérance qui n'est pas une simple attente mais le modelage de l'avenir par l'action en faveur de la paix. Tout cela pour la justice. Une magnifique leçon de courage, d'abandon et de persévérance !
La tente des nations : des personnes qui construisent des ponts
Le rabbin colon que nous avons rencontré et qui œuvre depuis un an et demi pour plus de dialogue, nous disait que pendant cinquante ans, il n'avait rencontré aucun Palestinien, que tout se passait comme s'ils n'existaient pas alors que de l'autre côté du mur où il habitait, vivaient des Palestiniens ! Ainsi, le chemin vers une plus grande unité des Chrétiens, passe aussi par ces lieux de rencontres : que ce soit des lieux de prières, mais aussi des lieux informels de vie et de partage. Nous ne pouvons passer toute notre vie en sachant que nos frères chrétiens vivent dans la même ville et ne pas les rencontrer en frères ! Lors du Jugement Dernier, je suis convaincu que le Seigneur qui a versé son sang pour nous, nous posera cette question (Gn 4,10, question posée à Caïn, faisant écho à la quête de Dieu cherchant Abel): "Qu'as-tu fait ? Ecoute, le sang de ton frère crie du sol vers moi", le sang versé mais aussi le cri de la souffrance, de l'ignorance et de la critique. Sommes-nous prêts à verser notre sang pour nos frères ? Je terminerai avec ces mots de Mère Teresa : "Gardons dans nos cœurs la joie de l'amour de Dieu et partageons cette joie de nous aimer les uns les autres comme Il aime chacun de nous."
Icône au monastère de Saint Gérasime du Jourdain près de Jéricho
                                                                                                                          Nicolas


Je prends parti


« Et le roi leur répondra: Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous les avez faites. » Mt 25,40

Il est tellement facile ici, en plein milieu du conflit israélo-palestinien d’oublier les personnes. D’adhérer à un discours que ce soit celui du camp israélien ou celui du camp palestinien et d’oublier que derrière le mot adversaire habitent tant de femmes, d’hommes et d’enfants. Il est facile d’oublier que les  chiffres, les statistiques démographiques, les faits historiques, les provocations et même les actes violents n’ont pu avoir raison de cette vie que l’on rencontre partout : des parents qui s’inquiètent pour leurs enfants, des couples qui veulent vivre leur amour, des enfants qui jouent dans la rue.

Il est facile d’oublier que toutes les ressources investies dans les armes ou dans la haine ne peuvent briser l’hospitalité vécue ici dans son sens le plus vrai, le plus intense, le plus intime. Quand je sais ce que peut couter un sourire quand on ignore de quoi demain sera fait, je ne peux que rendre grâce au Seigneur de la moisson de sourires et de la bienveillance que j’ai récolte ici pendant ce séjour. Je m’émerveille, dans une terre déchirée par le conflit de la bonté des personnes de tous les horizons.

Si je dois prendre parti dans ce conflit, je prends parti pour les gens simples d’un côté et de l’autre du mur. Je prends parti pour ces familles, pour ces hommes et ces femmes qui arrachent au temps et aux violences, la grande victoire d’une vie banale : un travail, un foyer, quelques rêves, et le miracle quotidien d’un rire ou d’un chant.

Je prends parti pour les petits, quels qu’ils soient ou qu’ils se trouvent, car, je le crois fermement, ce sont eux qui l’emporteront.

Helena   

dimanche 26 juillet 2015

Wall Street (in Bethlehem)

L'article pourrait aussi s'appeler "S'ils se taisent, les pierres crieront" (Luc 19, 40)
L'Institut Tantur qui nous accueille est un endroit merveilleux, au sommet d'une colline et entouré d'un très agréable jardin, fleuri et ombragé. Une seule chose (outre l'absence de clim dans les chambres!) nous rappelle que ce n'est cependant pas le jardin d'Eden : la vue sur Bethlehem, à vol d'oiseau à environ 200 mètres. Depuis 2002, Bethlehem – qui se situe dans la grande banlieue de Jérusalem – est séparée de celle-ci par la « barrière de séparation israélienne », en cours de construction autour de toute la Cisjordanie et la bande de Gaza. Je mets des guillemets sur sa dénomination, parce que celle-ci ne fait pas l'unanimité: Israélien (ou partisan du projet), on pourrait aussi appeler cette construction « grillage de séparation », « zone de couture », « barrière anti-terroriste », « clôture de sécurité » ou encore « muraille de protection ». Et Palestinien (ou contestataire de ce projet) on dirait « mur de la honte », « mur d'annexion », « mur de l’apartheid », « mur de séparation raciale ».

Il est ainsi difficile de se situer.... D'un point de vue purement matériel, il est vrai qu'il est difficile d'appeler cette construction « mur », puisque seuls 5% des 730 km est effectivement un mur (en béton, généralement de huit mètres de haut), dans les zones urbaines. Le reste est une barrière constituée de différentes couches de grillages, barbelés et no man's land sur une largeur de 50 mètres (à moins que la topographie n'exige que cela soit plus large). La séparation fait environ 730 km, suivant un parcours compliqué: en gros elle suit (sur 20% de sa longueur) la ligne verte définie par les nations unies (qui fait environ 320 km), mais en certains endroits elle pénètre très largement à l'intérieur de la Cisjordanie, en particulier pour intégrer des colonies israéliennes, certains accès à l'eau et quelques terres agricoles. En tout cas, vu depuis Tantur, c'est bien un mur qui entoure Bethlehem.

Je ne souhaite pas ici discuter de la légitimité du mur, ce serait trop compliqué : je note seulement deux points complémentaires:
- L'objectif de faire baisser l'insécurité en Israël semble tout à fait atteint, puisque, par exemple, le nombre d'attentats a littéralement fondu. C'est donc un succès.
- Mais, après avoir pris acte de la position de la Cour Internationale de Justice (qui affirme : « L'édification du mur qu'Israël, puissance occupante, est en train de construire dans le territoire palestinien occupé, y compris à l'intérieur et sur le pourtour de Jérusalem-Est, et le régime qui lui est associé, sont contraires au droit international »), l'Assemblée générale des Nations Unies a voté, en juillet 2004, une résolution exigeant d’Israël qu'il suive le droit international.

Plutôt qu'une analyse complexe des enjeux et effets de cette clôture de séparation (à but sécuritaire ou politique?) – ce que je ne saurais pas faire puisque tout ceci me dépasse tout à fait -, je vous propose de partager des photos que j'ai prises à Bethlehem, et qui disent quelque chose de la réalité vécue par les gens qui y habitent. Évidemment, ce ne sont que quelques clichés amateurs, pris, qui plus est, dans un périmètre restreint: Ils sont donc partiels et il ne faut donc pas leur donner plus de valeur que celle d'un témoignage.







Cette photo est dédicacée à Karine G.



Icone de "Notre-Dame qui fait tomber les murs" écrite sur le mur à l'endroit où il entoure le monastère de l'Emmanuel 

Cédric de La Serre

samedi 18 juillet 2015

Saint Paul nous donne une clé


La complexité de la situation des chrétiens : ce que je comprends.

Je n'apprendrai rien à personne en écrivant que les relations inter-religieuses sont ici compliquées... Mais elles ne sont pas que cela : elles sont aussi complexes. Aussi aimerais-je, dans ce billet, témoigner de ce que j'ai pu en saisir ces derniers jours: Trop souvent, on assimile israélien et juif, arabe et musulman, et on oppose les deux camps. Or, c'est un raccourcit médiatique qui empêche de comprendre bien des situations, bien des événements.

La population de l’État d’Israël est composée à 75% de juifs, 30% n'étant pas nés sur le territoire israélien (c'est-à-dire qu'ils arrivent en Israël avec leur culture, leur langue et leur histoire propres), et leurs relations à la foi, au culte et à la pratique religieuse sont trop divers pour que je puisse en rendre compte. Un rabbin disait hier soir, « si vous avez deux juifs, vous avez dix opinions ». Ainsi, tous les juifs ne sont pas des militants sionistes ou nationalistes (tout l'éventail d'opinions est représenté dans la société), et on ne peut pas assimiler les orthodoxes (environ 9% de la population juive) aux nationalistes : ce sont deux enjeux différents et par certains aspects contradictoires, puisqu'une partie des nationalistes est toute à fait laïque, voire athée, et qu'une partie des orthodoxes refuse toute collaboration avec un État non-théocratique.
A côté des juifs, on trouve aussi, en Israël, près d'un quart d'Arabes israéliens, ce qui est loin d'être négligeable. Là aussi il y a une grande diversité religieuse, puisque si une large partie est musulmane, il y a une grosse minorité (environ 150 000 personnes) d'arabes chrétiens israéliens (de diverses confessions et dénominations), une autre druze, etc.

Voilà pour l’État d’Israël. A côté, la Palestine n'est pas non plus uniforme. Elle compte environ un tiers d'habitants de moins qu’Israël, mais l'absence de statistiques fiables récentes ne permet pas une étude très précise. On note, en gros : une grosse majorité musulmane (97% de la population, essentiellement sunnite), une petite minorité chrétienne concentrée dans quelques villes et villages, et une infime minorité samaritaine. A cela, on pourrait ajouter les colons juifs. Ainsi, si Bethléhem/Bethjala comptent peut-être un tiers de chrétiens, la bande de Gaza n'en aurait que 1200 sur 1,8 millions d'habitants.
Pour saisir la complexité, il faut aussi noter que les territoires dits palestiniens (c'est-à-dire qui ne sont pas explicitement partie de l’État d’Israël), sont pour une petite partie occupés par des colonies israéliennes, et pour le reste divisés en trois zones (A, B, C) dans lesquelles la souveraineté palestinienne est plus ou moins relative. La zone C, sous complet contrôle israélien, comprend ainsi 60% du territoire palestinien, la zone A, sous complet contrôle palestinien, comprenant 18% du territoire.

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Dans ce cadre, la situation des chrétiens est particulièrement complexe. D'une part, il y a les divisions historiques (cf. les articles précédents qui rendent compte de la situation contrastée dans les basiliques du saint Sépulcre et de la Nativité). Les chrétiens sont aussi administrativement divisés entre ceux qui sont Israéliens et ceux qui sont Palestiniens. Enfin, étant une petite minorité, ils sont aussi victimes d'excités et d'extrémistes de tous bords.

A titre d'exemple :
  • Peu avant l'entrée de la basilique de l'Annonciation à Nazareth, on peut voir ces affiches (cliquer sur les photos pour les agrandir et les lire). Elles sont là depuis plusieurs années, et bien de la majorité des musulmans ne se retrouve pas dans cette provocation, les pouvoirs publics ne sont pas assez forts pour pouvoir les faire retirer...


Et cela, alors que les chrétiens sont impliqués de manière édifiante dans la recherche du bien commun, tant en Israël qu'en Palestine. Je ne donne qu'un exemple : l'université de Bethléhem, seule opportunité d'études supérieures pour beaucoup de jeunes de Cisjordanie, est sous la tutelle des Frères des écoles chrétiennes, des religieux catholiques, et une large partie de son financement est directement assuré par des organismes chrétiens. Mais elle accueille 70% d'étudiants musulmans. Il ne s'agit ici évidement pas de prétendre que les chrétiens sont plus saints que les autres; il va de soi qu'ils sont tout autant pécheurs et qu'il est impossible de savoir ce qui habite le cœur de chacun. Il va aussi de soi que des individus et institutions tant israéliennes que palestiniennes œuvrent avec zèle et honnêteté à la paix, à la justice et à la fraternité. Tantur en est souvent le témoin et/ou l'hôte. Mais par cet article, je veux seulement témoigner du sentiment qui m'habite et de ce que j'ai vu et vécu ces dernières semaines.

Dans ce cadre, je ne peux que reprendre les mots de l'abbé de l'abbaye de la Dormition - maison-mère du monastère de la multiplication des pains -, en réponse à l'incendie de Tabgha: « Il y a quelques nuits, nous avons souffert une attaque sévère. Un feu qui mettait en danger des vies humaines. Tous les résidents de la région – chrétiens, druzes, musulmans et juifs devraient protester contre cet acte. Mais nous sommes chrétiens et nous devons réagir en tant que chrétiens. Nous sommes dans le lieu où le Christ accomplissait ses miracles, et nous accueillons ici des moines malades depuis des années. Nous remplacerons ce terrible feu de l’incendie par le feu de l’Amour et du Pardon de Dieu. »


Cédric de La Serre

dimanche 12 juillet 2015

"Le disciple n'est pas au-dessus de son maître..." (Mt 10,24)



            Pour ce soir, je viens partager mes dernières expériences qui peuvent se résumer avec cette parole de Jésus lui-même, lorsqu'il annonce les persécutions auxquelles les disciples et l'Eglise auront à faire face : "Le disciple n'est pas au-dessus de son maître, ni le serviteur au-dessus de son seigneur. Au disciple, il suffit d'être comme son maître et au serviteur d'être comme son seigneur." (Mt 10,24-25a). Pas de panique, je n'ai pas été lynché sur la place publique mais, sur cette Terre Sainte, le Seigneur m'a permis de vivre à une moindre mesure ce que lui-même a pu vivre. 
Entrée de l'église de la Nativité
         Je vais surtout parler de mon après-midi à Béthléem… Voulant prendre du temps pour prier dans l'église de la Nativité, près du lieu où la naissance de Jésus a été fixée, je me rends à pied dans cette ville où de nombreux musulmans sortaient des mosquées et essayaient de passer le checkpoint. De nombreux policiers étaient présents. J'arrive à l'église de Nativité qui était quasi vide, ce qui était assez surprenant. Toutes les conditions étaient favorables pour que je puisse prendre du temps pour prier. Je demande au moine orthodoxe présent si je pouvais rester un temps, ce à quoi il m'a répondu : "non", sans rien d'autre. "[Marie] accoucha de son premier-né, l'emmaillota et le déposa dans une mangeoire parce qu'il n'y avait pas de place pour eux dans la salle d'hôtes" (Lc 2,7). Aujourd'hui, même si le lieu est vide, ce sont les pèlerins qui sont invités à passer rapidement et à trouver d'autres lieux pour prendre le temps de prier. Le Seigneur est bon car j'ai pu trouver une petite chapelle tout à fait calme…
              En guise de transition, une image de Jésus nouveau-né, Marie et Joseph ne pouvant aller se faire recenser à Jérusalem, bloqué par le mur de division entre Bethléem et Jérusalem.


            De retour, je voulais passer le checkpoint comme les Palestiniens le font chaque jour. Qu'est-ce qu'un checkpoint ? Bethléem est une ville peuplée par des palestiniens, en majorité musulmans. Pour rejoindre Jérusalem, territoire israélien, ils doivent passer par des points de contrôles à la fois pour voir s'ils ont les permissions nécessaires pour passer le mur (double contrôle) et contrôler le contenu de leurs sacs, tout cela pour des raisons de sécurité. Nous étions une soixantaine à passer le checkpoint 300 tassés pour essayer de passer le premier portique où une jeune soldate (18 ans) prenait le temps pour contrôler les documents. Les esprits s'échauffaient : des enfants pleuraient, des femmes criaient, des hommes étaient à deux doigts de se battre. Pour essayer de calmer les esprits, la jeune femme bloquait le portique dès que des cris se faisaient entendre, c'est-à-dire toutes les trente secondes. Je retiendrai le regard de ces hommes, ces femmes, ces enfants, à la fois agacé et résolu de passer ce checkpoint, à la fois surpris de voir un étranger passer avec eux (par curiosité… ont-ils pu penser…) et bienveillant. Je me suis en effet retrouvé rapidement devant tout le monde, me laissant passer petit à petit très discrètement. Le nombre de personnes refoulées était important et le deuxième contrôle voyait à nouveau des personnes refusées de passer. "En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous l'avez fait à l'un de ces plus petits, qui sont mes frères, c'est à moi que vous l'avez fait." (Mt 25,40)

Lorsqu'on est en séjour ou en pèlerinage en Terre Sainte, on cherche à voir les lieux où Jésus est passé pour appréhender d'une manière différente notre lecture des évangiles et de la Bible en général. Pouvoir vivre un peu ce que lui a vécu (naissance et rejet par ses frères) est une expérience inattendue mais riche. Merci Seigneur pour tout ce que tu nous permets de vivre et qui renforce notre foi, notre sens du prochain et de l'amour de tous.
Pour terminer, voici une photo de Notre-Dame qui fait tomber les murs, icône peinte sur le mur entre Bethléem et Jérusalem, non loin du checkpoint 300, en face du monastère de l'Emmanuel. Sur cette icône, Marie pleure de voir ses enfants se diviser. Vierge Marie, viens abattre les murs de nos cœurs pour bâtir ensemble la paix et l'unité.
                                                                        
          Je termine avec cette petite phrase de Mgr Lustiger, dans le jardin qui lui est dédié au monastère d'Abu-Gosh où nous étions ce matin. La Terre Sainte compte sur nos prières. 





                                                                                                                                Nicolas

Abu Gosh, terre de paix


Nous étions aujourd'hui à l'abbaye bénédictine d'Abu Gosh, l'un des lieux possibles d'Emmaüs. Outre une remarquable église croisée (XII°siècle) très bien restaurée et une double communauté de moines et moniales olivétains, le monastère accueille depuis peu un mémorial créé à l'initiative de juifs de France en souvenir du cardinal Lustiger

J'ai été touché par cette visite et


par la paix évidente et forte qui émane du lieu, terre chrétienne dans un village 100% musulman, en Israël. La paix de la liturgie, la beauté du jardin et la rencontre avec un moine qui nous a témoigné de ce qu'il vit de beau et de profond dans les rencontres avec des personnes si différentes et parfois éloignées de ce qui l'anime au fond de son âme, m'a saisit et fait toucher du doigt quelque chose de l'unité à laquelle le Christ nous appelle : Assurément, cette unité sera une expression de la paix et de l'amour. L'unité sera à la fois contagieuse et aussi fragile que les fleurs du beau jardin de l'abbaye. 
Cédric de La Serre

samedi 11 juillet 2015

Shalom Sabbat!




"Mais le septième jour est le sabbat consacré à l'Eternel, ton Dieu: tu ne feras aucune œuvre, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni ton bœuf, ni ton âne, ni aucune de tes bêtes, ni ton étranger qui est dans tes portes, afin que ton serviteur et ta servante se reposent comme toi " Dt 5,14
 
J’ai été si heureuse de pouvoir accueillir le sabbat hier soir dans une maison juive. J’aime cette notion si chère au judaïsme d’habiter le temps, de voir le temps comme malléable, souple, influençable, plutôt que comme quelque chose que nous subissons. De fait, dans notre expérience quotidienne, le temps n’est pas constant, il s’étire dans les moments de tristesse, et s’accélère dans une sorte de danse effrénée lorsque nous sommes heureux…

Le sabbat vient, à la fin de la semaine, pour nous rappeler que le temps n’est pas unique, uniforme, qu’il y a des qualités de temps différents : du temps quotidien absorbe par le travail au temps des vacances qui semble se dérouler dans une douceur infinie.

Le temps du shabbat vient nous rappeler que Dieu, lors de la création, n’a pas seulement confié à l’homme et la femme la terre mais aussi le temps, qu’il a créé au premier jour. L’homme, la femme comme les gardiens non seulement du paradis mais aussi du temps.

C’est le sens, je pense, de cette prière du vendredi soir où celui qui prie accueille le soir qui tombe et le transforme en shabbat c’est-à-dire en un temps tourné vers le Seigneur, vers les autres, que les juifs remplissent de prières, de partage, de joie, de repos, de silence, faisant de ce jour différent aux autres un chef d’œuvre spirituel…

Ce soir viendra l’heure de refermer par la prière cette lucarne de sérénité et de quiétude, pour reprendre les activités quotidiennes. D’ici là, je vous souhaite un Shalom Sabbat, un sabbat de paix.

Helena Vicario