jeudi 23 juillet 2015

"Qui sont mes frères ?"


           Hasard ou Providence ? La liturgie de la messe nous proposait avant-hier et nous propose à nouveau aujourd'hui deux versions d'un même événement : la mère et les frères de Jésus le cherchent et il répond : "Qui est ma mère ? Qui sont mes frères ?" (Mt 12,46-50 et Mc 3,31-35), comme si Dieu voulait renforcer ce que nous venons de vivre.
Nous revenons de deux jours en Cisjordanie, territoire palestinien (où des musulmans en très grande majorité vivent en paix avec une faible minorité chrétienne) sous contrôle israélien pour la plupart. Des visites avec quelques liens bibliques mais surtout de nombreuses rencontres avec des Palestiniens : prêtres gréco-orthodoxe, arabe épiscopalien, melkite, un guide palestinien chrétien, une jeune comptable d'une société de commerce équitable (http://www.canaanfairtrade.com/) et tant de visages croisés.
Première surprise pour moi : nous avons passé la majeure parte de la journée d'hier et la nuit à Naplouse. J'ai été surpris par mon sentiment de sécurité (plus fort qu'ailleurs) dans les rues de cette ville sous autorité palestinienne et où nous pouvons lire à l'entrée un panneau mis par les Israéliens indiquant : "L'entrée pour les citoyens israéliens est interdite, dangereuse pour vos vies et est contraire à la loi israélienne".
Deuxième surprise : Helena et moi sommes allés découvrir la ville hier en fin d'après-midi pour en prendre le pouls. Nous avions à peine fait vingt mètres qu'une personne nous sourit et nous dit en anglais : "Bonjour, bienvenue en Palestine". Ce n'était que le premier d'une série de quinze ou vingt personnes ! Chrétien (minorité très faible) ou musulman ? Peu importe mais le sentiment d'être attendu et d'être accueilli, contrairement à beaucoup d'autres (toutes ?) villes où nous sommes passés et nous ressemblions plus à un billet de banque ambulant qu'à autre chose.
Rencontre de ce matin : Le prêtre melkite à Zababdeh nous indiquait qu'aujourd'hui, par notre visite, il avait l'impression de ne plus être le frère oublié mais le frère bien-aimé. Qui sont mes frères ? Les Juifs sont pourtant nos aînés dans la foi, les plus proches avec qui nous partageons l'Ancien Testament, et pourtant je me sens si éloigné d'eux… La richesse du Christianisme est que, par amour, Jésus a fait de chacun d'entre nous ses frères. Nous sommes donc tous des frères et pas seulement avec les plus proches mais aussi avec nos frères au loin (géographiquement et de foi). Ce prêtre ajoutait ce matin que nous devions salir nos mains à construire ces ponts par-dessus les murs pour montrer que l'amitié et l'amour étaient plus forts que la haine et la séparation.
Dans les Evangiles, la réponse de Jésus est que tous ceux qui font la volonté du Père qui est dans les Cieux est un frère, une sœur, une mère. C'est-à-dire tous ceux dont la charité en paroles et en actes permet de rapprocher ceux qu'ils rencontrent de Dieu : un sourire, une parole d'accueil pendant ces deux jours m'ont rappelé la bonté et l'Amour inconditionnel de Dieu pour chacun. Dans ce séjour, je suis donc surpris de voir ceux qui, en Terre Sainte, sont pour moi "mon frère, ma sœur, ma mère"…
                                                                                                                                   Nicolas
Au premier plan, église melkite de Zababdeh et, juste derrière, le minaret d'une mosquée.
                                                                                                                     

mardi 21 juillet 2015

Une question de génération?

Nous quatre français sommes les plus jeune du programme. Au départ, je ne pensais pas que cela serait un élément important dans le sens où à l'IPT depuis mes début, j'ai souvent été la plus jeune ou dans les plus jeune. Pourtant quelque chose m'a frappé à plusieurs reprises depuis le début du séjour. 


Nous parlons beaucoup de notre foi ensemble, du moins nous essayons d'expliquer les uns aux autres ce que le Christ manifeste en nous, comment nous vivons notre foi et comment cela se traduit au quotidien. Mais après plusieurs conversations, je me suis rendue compte que ces types de discussions ne venaient qu'entre nous. 

Je me suis dans un premier temps demandée si cela avait quelque chose à voir avec les différences de cultures (les français serions nous devenus si expressif sur nos sentiments?). Mais cela ne semblait pas être le cas. Puis j'ai pu discuter avec quelques uns des plus âgés du groupe qui sont arrivés au même constat mais à l'inverse... Eux sont surpris de voir avec quelle facilité nous exprimons notre foi et notre relation à Dieu. 

Là où je plaçais un problème culturel, se trouvait en fait un problème générationnel. Et je me souviens de mon grand père qui insistait sur le fait que la prière devait être dite dans son cœur et non à haute voix. De cette pudeur et cette gêne à exprimer ce que Dieu signifiait pour lui et quelle relation il avait avec lui. 

Et pourtant, Jean m'a regardée en souriant, les yeux émus me disant à quel point, elle trouvait beau cette facilité d'exprimer ce que l'on peut ressentir avec Dieu. Comme si, il s'agissait de quelque chose uniquement réservé aux nouvelles générations. Mais je me rends compte en réalité, que bien souvent, cette différence d'expression marque une sorte de division générationnelle dans la communauté. Après avoir parlé avec Jean, mon cœur était pleins de joie tant cet échange a été riche et tant j'ai appris avec elle qu'elle n'a surement de moi. 

Je crois qu'il est important de sensibiliser chaque génération à se rencontrer et à partager. Parce que la jeunesse a énormément à apprendre des personnes plus âgées, tout comme ces personnes âgées ont à apprendre des jeunes. Souvent, on pense que les séparer est le mieux pour que chacun puisse vivre ce qu'il à a vivre comme il en a l'habitude et le plus adapté possible. Je vois à quel point un mur est difficile à vivre au quotidien, mais en ne provoquant pas de rencontre entre les générations, nous créons nos propres murs à l'intérieur de nos communautés. Et je pense que l'unité pourra faire un pas de plus si nos communautés abattent leurs barrières.


Et ce soir, en discutant à la fin du diner avec Jane, elle m'a dit qu'elle prierait pour mes projets pour cette année et qu'elle ne doute pas que le Seigneur répondra, et même qu'il me le dira lui-même. Je lui ai dis que je prierais pour que le Seigneur réponde à ses prières personnelles aussi, elle m'a alors dit qu'elle allait commencer à se mettre à l'écoute alors! 

Karine.

dimanche 19 juillet 2015

Un peu d'étymologie #2




Le saviez vous... le terme sarcastique que l'on utilise en français comme une raillerie tournant en dérision une personne ou une situation vient du terme grec sarks qui signifie la chair et plus précisément de sarkasmos
Littéralement il s'agit de brûler la chair... On a employé ce terme car à l'époque se moquer de quelqu'un signifiait le brûler dans sa chair.

Karine.

A Césarée de Philippe...

... il est interdit de marcher sur l'eau!
Aucun écrit n'indique que Jésus entra à l'intérieur de ce sanctuaire. Cependant c'est dans les environs de la ville qu'a eu lieu la reconnaissance de Pierre envers Jésus comme Messie.
 (cf. Mt 16,13-20; Mc 8, 27-30)
Cédric de La Serre

samedi 18 juillet 2015

Saint Paul nous donne une clé


La complexité de la situation des chrétiens : ce que je comprends.

Je n'apprendrai rien à personne en écrivant que les relations inter-religieuses sont ici compliquées... Mais elles ne sont pas que cela : elles sont aussi complexes. Aussi aimerais-je, dans ce billet, témoigner de ce que j'ai pu en saisir ces derniers jours: Trop souvent, on assimile israélien et juif, arabe et musulman, et on oppose les deux camps. Or, c'est un raccourcit médiatique qui empêche de comprendre bien des situations, bien des événements.

La population de l’État d’Israël est composée à 75% de juifs, 30% n'étant pas nés sur le territoire israélien (c'est-à-dire qu'ils arrivent en Israël avec leur culture, leur langue et leur histoire propres), et leurs relations à la foi, au culte et à la pratique religieuse sont trop divers pour que je puisse en rendre compte. Un rabbin disait hier soir, « si vous avez deux juifs, vous avez dix opinions ». Ainsi, tous les juifs ne sont pas des militants sionistes ou nationalistes (tout l'éventail d'opinions est représenté dans la société), et on ne peut pas assimiler les orthodoxes (environ 9% de la population juive) aux nationalistes : ce sont deux enjeux différents et par certains aspects contradictoires, puisqu'une partie des nationalistes est toute à fait laïque, voire athée, et qu'une partie des orthodoxes refuse toute collaboration avec un État non-théocratique.
A côté des juifs, on trouve aussi, en Israël, près d'un quart d'Arabes israéliens, ce qui est loin d'être négligeable. Là aussi il y a une grande diversité religieuse, puisque si une large partie est musulmane, il y a une grosse minorité (environ 150 000 personnes) d'arabes chrétiens israéliens (de diverses confessions et dénominations), une autre druze, etc.

Voilà pour l’État d’Israël. A côté, la Palestine n'est pas non plus uniforme. Elle compte environ un tiers d'habitants de moins qu’Israël, mais l'absence de statistiques fiables récentes ne permet pas une étude très précise. On note, en gros : une grosse majorité musulmane (97% de la population, essentiellement sunnite), une petite minorité chrétienne concentrée dans quelques villes et villages, et une infime minorité samaritaine. A cela, on pourrait ajouter les colons juifs. Ainsi, si Bethléhem/Bethjala comptent peut-être un tiers de chrétiens, la bande de Gaza n'en aurait que 1200 sur 1,8 millions d'habitants.
Pour saisir la complexité, il faut aussi noter que les territoires dits palestiniens (c'est-à-dire qui ne sont pas explicitement partie de l’État d’Israël), sont pour une petite partie occupés par des colonies israéliennes, et pour le reste divisés en trois zones (A, B, C) dans lesquelles la souveraineté palestinienne est plus ou moins relative. La zone C, sous complet contrôle israélien, comprend ainsi 60% du territoire palestinien, la zone A, sous complet contrôle palestinien, comprenant 18% du territoire.

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Dans ce cadre, la situation des chrétiens est particulièrement complexe. D'une part, il y a les divisions historiques (cf. les articles précédents qui rendent compte de la situation contrastée dans les basiliques du saint Sépulcre et de la Nativité). Les chrétiens sont aussi administrativement divisés entre ceux qui sont Israéliens et ceux qui sont Palestiniens. Enfin, étant une petite minorité, ils sont aussi victimes d'excités et d'extrémistes de tous bords.

A titre d'exemple :
  • Peu avant l'entrée de la basilique de l'Annonciation à Nazareth, on peut voir ces affiches (cliquer sur les photos pour les agrandir et les lire). Elles sont là depuis plusieurs années, et bien de la majorité des musulmans ne se retrouve pas dans cette provocation, les pouvoirs publics ne sont pas assez forts pour pouvoir les faire retirer...


Et cela, alors que les chrétiens sont impliqués de manière édifiante dans la recherche du bien commun, tant en Israël qu'en Palestine. Je ne donne qu'un exemple : l'université de Bethléhem, seule opportunité d'études supérieures pour beaucoup de jeunes de Cisjordanie, est sous la tutelle des Frères des écoles chrétiennes, des religieux catholiques, et une large partie de son financement est directement assuré par des organismes chrétiens. Mais elle accueille 70% d'étudiants musulmans. Il ne s'agit ici évidement pas de prétendre que les chrétiens sont plus saints que les autres; il va de soi qu'ils sont tout autant pécheurs et qu'il est impossible de savoir ce qui habite le cœur de chacun. Il va aussi de soi que des individus et institutions tant israéliennes que palestiniennes œuvrent avec zèle et honnêteté à la paix, à la justice et à la fraternité. Tantur en est souvent le témoin et/ou l'hôte. Mais par cet article, je veux seulement témoigner du sentiment qui m'habite et de ce que j'ai vu et vécu ces dernières semaines.

Dans ce cadre, je ne peux que reprendre les mots de l'abbé de l'abbaye de la Dormition - maison-mère du monastère de la multiplication des pains -, en réponse à l'incendie de Tabgha: « Il y a quelques nuits, nous avons souffert une attaque sévère. Un feu qui mettait en danger des vies humaines. Tous les résidents de la région – chrétiens, druzes, musulmans et juifs devraient protester contre cet acte. Mais nous sommes chrétiens et nous devons réagir en tant que chrétiens. Nous sommes dans le lieu où le Christ accomplissait ses miracles, et nous accueillons ici des moines malades depuis des années. Nous remplacerons ce terrible feu de l’incendie par le feu de l’Amour et du Pardon de Dieu. »


Cédric de La Serre

vendredi 17 juillet 2015

"Oui, il est bon, il est doux pour des frères de vivre ensemble et d'être unis !"


Le Mont Hermon (enneigé en hiver) donne naissance à un des trois cours d'eau constituant le Jourdain et qui permet d'approvisionner tout Israël, dont Jérusalem (Sion), en eau par un pompage dans le lac de Tibériade.

01 Oui, il est bon, il est doux pour des frères de vivre ensemble et d'être unis !
02 On dirait un baume précieux, un parfum sur la tête, qui descend sur la barbe, la barbe d'Aaron, qui descend sur le bord de son vêtement.
03 On dirait la rosée de l'Hermon qui descend sur les collines de Sion. C'est là que le Seigneur envoie la bénédiction, la vie pour toujours. (Ps 132)

De retour de Galilée, voilà mes premières impressions. J'ai été frappé par les distances parcourues par Jésus et ses disciples. Les passages se succèdent à vitesse grand V dans les Evangiles mais les distances entre les lieux ne sont pas négligeables. Ainsi, Jésus passait beaucoup de temps informel à marcher, discuter, vivre avec ses disciples. Ses disciples le voyaient vivre, agir, parler, choisir. 
Cheminer vers l'unité passe par cela : se côtoyer, passer du temps ensemble dans les joies et les frottements de la vie quotidienne, dans l'amour fraternel et la miséricorde sans cesse renouvelée, dans les différences, les discussions où chacun garde sa position, sa particularité, sa richesse. Ce que nous vivons ici ! Une certitude reste : celle d'être tous aimés et sauvés par Dieu, celle de la présence de Jésus qui nous a assuré de sa présence jusqu'à la fin des temps et d'être ainsi ré-unis autour du Verbe de Dieu, Celui que nous voulons suivre et à qui nous voulons donner notre vie. 

                                                                                                                      Nicolas